Publicite pour GAL
22 décembre 2024
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Tout comme Khalifa Ababacar Sall, la mairie de Dakar est en train de subir un « thiopet, té dara dou yeungou » des mains de Barthélémy Dias. Du temps de Macky Sall, le refrain de l’appel à la violation de la démocratie était illustré par les cas de Khalifa Sall et de Karim Wade, chanté par tous les opposants, majoritairement leurs camarades présentement au pouvoir. Aujourd’hui, la mairie de Dakar est en train d’être arrachée des mains de son jeune maire, élu démocratiquement par le peuple à travers une coalition de l’opposition qui fut au cœur des combats, notamment dans l’affaire Sweet Beauty opposant l’actuel Premier ministre à Adji Sarr. Cette coalition avait la capacité de faire bouger toutes les lignes grâce à son leadership unifié, mais ses luttes étaient centrées sur les dirigeants actuels, eux-mêmes en conflit majoritairement avec la justice sous l’ancien régime de Macky Sall. Actuellement, aucune autre dynamique semblable n’a été mise en place, et l’opposition opte pour une approche républicaine qui occulte le « Gatsa Gatsa ».

 

Est-ce une bonne stratégie politique face à un gouvernement jadis très violent lors des manifestations, des saccages et des violences physiques et verbales ? Certains diront oui, car le pays a besoin de stabilité, et on ne répond pas à la violence par la violence. Une bonne démarche à saluer.

Cependant, un manque d’unité criant se fait remarquer. Cela s’explique par le fait que l’ancien régime est en sursis à cause de nombreux dossiers judiciaires qui pourraient leur être reprochés, notamment les accusations de détournements de fonds publics et l’abolition de la loi d’amnistie. Par ailleurs, moralement, le régime de Macky reste silencieux dans sa majorité, se disant que c’est une bataille des « Domou Ndeye », une situation très dommageable et embarrassante politiquement.

Barthélémy Dias avec Pastef

Des événements survenus en 2011, à l’approche des élections locales, dont les vidéos témoins sont encore disponibles sur internet, ont conduit à la mort d’un homme du nom de Ndiaga Diouf. Barthélémy Dias a été jugé et condamné en 2017 à deux ans de prison, dont six mois fermes, pour « coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention de la donner » et « détention illégale d’armes sans autorisation ». Il passera cinq mois en prison avant de sortir et fera appel de sa condamnation. L’affaire a été renvoyée plusieurs fois. À 50 ans, l’opposant politique sénégalais est à la tête de la mairie de Mermoz-Sacré-Cœur depuis 2009 puis présentement, maire de la ville de Dakar, capitale du Sénégal avec 50 milliards de francs CFA de budget annuel, ce qui fait de lui l’homme le plus puissant que son adversaire politique Ousmane Sonko. En même temps, Barth prépare les Jeux olympiques de la jeunesse de 2026 avec tous les enjeux économiques et politiques qui s’y rapportent. Barthélémy Dias a été arrêté deux fois en l’espace d’une semaine. Le 10 novembre, il est convoqué au tribunal à 9h30 dans le cadre de son procès en appel dans l’affaire Ndiaga Diouf, mais ne se présente pas à la barre. Ce jour-là, entouré de ses militants et des opposants Ousmane Sonko et Malick Gakou, Barthélémy Dias est arrêté à la Médina, dans la banlieue de Dakar, après des échauffourées entre ses militants et la police. L’affaire est renvoyée au 1er décembre par le juge. Le mercredi 17, il se rend à la gare routière de Petersen, en centre-ville, pour, dit-il, distribuer des tracts pour son meeting d’investiture prévu ce dimanche. Mais son convoi est arrêté par les forces de l’ordre qui le conduisent au commissariat de Dieuppeul après quelques échanges musclés. Il sera relâché quelques heures plus tard. Le 17 mai dernier, Barthélémy Dias officialise donc sa candidature à la mairie de Dakar pour l’élection municipale du 23 janvier qui suivait.

Barthélémy Dias contre Pastef

Des événements survenus après les élections législatives, depuis l’avènement du nouveau pouvoir, Barthélémy Dias était dans son coin en train de se faire entendre à cause des réalisations qu’il faisait pour Dakar. En aucun moment il n’a été question qu’il se prononce sur la vie politique malgré toutes les dérives notées, jusqu’à l’élection législative où il est revenu sur scène pour s’imposer en étant tête de liste de la jeune et dernière coalition de l’opposition politique en place, « Samm Sa Kaddu ». Dans la légalité, les 64 jours de non-information du public concernant la décision du Conseil constitutionnel par rapport à l’élection législative anticipée restent un grand manquement contre la démocratie, la transparence et l’équité, et cela sera noté d’une encre indélébile sur le bilan du régime en place, même si ce n’est pas assez débattu. Suivront les violences verbales et physiques observées, qui ont été gérées judiciairement d’une manière qui laisse à désirer, car du côté de « Samm Sa Kaddu », plus de 80 membres de leur sécurité ont été emprisonnés, l’un d’entre eux est décédé dans les geôles dans des circonstances suspectes après les résultats du certificat de genre de mort. Un des parents des 80 prisonniers qui se rendait au procès est décédé par accident en cours de route pour retrouver son fils et le soutenir à son procès. Le procureur parle de 2 à 5 ans pour leur sort. Toujours dans la légalité, le siège de « Samm Sa Kaddu » a été brûlé bien avant le problème de Saint-Louis, et une plainte a été déposée avec constat du huissier, mais rien n’a été fait. Des discours d’appel à la violence ont été notés du côté de Pastef, les mêmes discours qui ont été prononcés sous le régime de Macky Sall sur les réseaux sociaux, avec des appels à faire brûler la maison des adversaires politiques et de leurs familles. Des discours de hauts responsables de Pastef ont décrété que Barthélémy Dias ne devait plus battre campagne, et rien n’a été fait juridiquement. Les auteurs de ces discours sont tranquilles dans leurs occupations, en tant que responsables politiques et membres du gouvernement de la république du Sénégal. Ousmane Sonko lui-même a appelé à la vengeance par un post sur Facebook que Facebook aurait même supprimé. Après les élections gagnées par Pastef, avec plus d’une centaine de députés, la population a renouvelé la tradition en donnant tout au pouvoir afin de lui permettre de dérouler son programme « Sénégal 2050 ».

Évoquant la légalité de cet acharnement politique violent contre Barthélémy Dias, quelques rares et courageux experts juridiques ont trempé leurs plumes pour évoquer le droit, dont la personne de l’expert Ndiaga Sylla qui reste constant et cohérent dans sa démarche vu son soutien sans cesse à ce régime en place quand ils étaient du côté de l’opposition récemment.

L’expert en droit électoral, Ndiaga Sylla, qui a soutenu activement Pastef dans ses conflits avec l’ancien régime, par son analyse sur la légalité des actes administratifs en jeu.

Ndiaga Sylla s’est penché sur la question de la révocation de Barthélémy Dias, mettant en marge selon lui certaines incohérences dans l’interprétation des textes de loi, en particulier les articles L.277, L.29 et L.30 du Code électoral. Il a estimé que la démission d’un conseiller municipal (article L.277) et les conditions liées à l’inéligibilité ne sont pas suffisamment claires et pourraient prêter à confusion.

Une autre question soulevée par M. Sylla concerne l’élection de Barthélémy Dias au suffrage universel, ce qui, selon lui, pourrait empêcher l’application de l’article L.277.

Dans un contexte plus large, un autre juriste, Monsieur Maïga, cite la décision du Conseil constitutionnel du 10 octobre 2024, qui avait validé la candidature de Barthélémy Dias en soulignant qu’il n’y avait aucune raison juridique de s’opposer à sa participation aux élections. Il soutient que cet antécédent pourrait peser lourd dans la future décision de la Cour d’appel. En effet, si cette dernière respecte les principes de droit et la jurisprudence du Conseil constitutionnel, l’arrêté préfectoral prononçant la révocation du Maire pourrait être annulé. M. Maïga souligne que la cour pourrait annuler la décision préfectorale en se fondant sur plusieurs violations possibles, notamment celle de la décision du Conseil constitutionnel, de l’article L.277 concernant la démission des conseillers municipaux, et de l’article L.29 relatif à la prescription extinctive de l’inéligibilité.

M. Maïga conclut en insistant sur le respect des textes en vigueur. Il rappelle que malgré des incohérences possibles dans les lois, il est crucial que les décisions administratives se conforment aux principes fondamentaux du droit. La force de notre démocratie repose sur le respect des institutions, des juges et des lois en place. Tout en invitant à une révision législative pour corriger les éventuelles lacunes des textes, il appelle à une interprétation rigoureuse et juste des textes législatifs et à un débat public constructif.

Ainsi, une nouvelle épreuve s’ouvre avec la radiation de Barthélémy Dias de l’Assemblée nationale, puis de la mairie de Dakar. Comment expliquer que Pastef, qui défendait Barth sur ce même procès et disait que Macky Sall voulait utiliser ce procès pour éliminer un adversaire politique, quelques années plus tôt, est aujourd’hui au pouvoir et réalise ce qu’il considérait alors comme un acharnement et un déni de démocratie ? Incroyable. Moralement, le pays a vraiment besoin d’un coup de grâce avant qu’on ne touche le fond. Il est temps d’agir et de reculer. En général, le pouvoir rend fou, et les proches des dirigeants au pouvoir ont peur de leur dire la vérité, car leur jouissance serait menacée. D’autres attendent d’être servis, car les décrets de nomination sont inépuisables. Rappelez-vous des fins de règne de Macky Sall et mettez-vous au travail, un peuple affamé et sans morale positive est pire que les effets des changements climatiques.

Rappelons qu’au temps des socialistes « la gauche », les écoles du parti étaient une deuxième chance pour les cartouchards et les non instruits. Elles offraient une rude formation morale et une excellente culture générale politique, basées sur le civisme, le volontariat, la vie associative, les initiatives de développement durable économique et collectives. Les fondamentaux du militantisme politique y étaient enseignés. Les jeunes qui sortaient de ces formations politiques étaient plus instruits que les diplômés et réussissaient à avoir une deuxième chance dans la vie. Barthélémy Dias fait partie de ces modèles de jeunes qu’il faut multiplier et réformer avec l’ère des nouvelles technologies et les enjeux des changements climatiques, au lieu de le soustraire ou d’essayer de le faire disparaître, pour assombrir dans l’obscurantisme un pays bâti sur des fondamentaux solides moralement par nos guides religieux et dans la légalité par nos textes exemplaires.

Parlant d’Ousmane Sonko, il est devenu une mission de lui rappeler qu’il est son propre directeur de campagne pour 2029, divinement. Si le bilan de Diomaye est reluisant, il aura à nouveau une chance d’occuper son poste de rêve. Si le bilan de Diomaye est non reluisant, Ousmane Sonko devra compter sur la violence pour occuper le poste de président en 2029, et à ce rythme, la population aura déjà changé de camp, car il ne faut nullement oublier que les Sénégalais savent se lasser, surtout face à la faim et au manque de résultats… Ainsi, la meilleure approche est de régler les problèmes judiciaires avec humilité et de faire travailler le pays à travers une forte politique de moralité, à l’image du président Bassirou Diomaye Faye, qui l’aspire et l’incarne d’après certains de ses discours et actes qui font espérer qu’il est dans cette voie.

Un pays se construit avec des esprits sains, productifs et positifs. Il faut du tout pour faire un monde, mais celui qui a la majorité de ses concitoyens conscients a plus de chances de se compter parmi les premiers au développement. Prenons l’exemple des pays d’Asie qui se sont développés rapidement, c’est la discipline et les valeurs humaines intrinsèques adoptées par tous qui ont fini par mettre le pays au travail. Après quelques décennies, on voit ces pays en images avant et après. Le Sénégal peut bien en arriver là, car nous ne sommes qu’à neuf mois de dérives sur cinq ans. Il est possible de tout revoir, reculer et stopper cette « hainocratie » pour instaurer une « amourocratie », une « disciplinocratie » et le travail.

Toute autre voie entreprise sera vaine, et le temps est le premier obstacle de ce régime en place. La clémence, la bienveillance, le respect, la solidarité, l’entraide, la paix, et la stabilité sont les seules armes morales pour faire face à cette guerre économique mondiale à nos frontières et dans le reste du monde. Laissez à Barth sa mairie, car toute chose doit s’analyser dans la légalité et la moralité, et à ces deux égards, Barthélémy Dias reste un légitime pour dérouler son travail jusqu’à la date légale de la bataille de Dakar prévue en 2027.

Zaynab Sangaré : Journaliste d’investigation, spécialisée en data journalisme

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